" (…) Toute création est ainsi à la fois le témoin d’un processus d’introjection psychique laissé en souffrance et la tentative d’en constituer l’auxiliaire. Elle est en cela un processus toujours inachevé. Cet inachèvement n’est pas son échec, mais sa fatalité. L’introjection « rate » toujours ce qu’elle tente ou, plutôt, elle le réussit d’une façon toujours imparfaite et toujours à parfaire. Enfin, la multiplicité des causes possibles de « ratage » d’une introjection nous oblige à une grande modestie par rapport au déchiffrage des images. Le plus souvent, il est impossible de dire, face à une image- et notamment face à une photographie-, s’il s’agit de l’exploration et de la mise en scène de conflits entre désirs et interdits, d’une expérience traumatique par sa violence propre, d’une expérience traumatisante par l’impossibilité d’en parler à un tiers ou des effets sur le créateur du secret inavouable d’un autre ! Et cela d’autant plus que ces différents types de causalité combinent souvent leurs effets. Il est plus facile de parler de « secret derrière les images » que de savoir chaque fois de quel type de « secret » il s’agit ! "
Serge Tisseron
Le mystère de la chambre claire / photographie et inconscient. 1996
Serge Tisseron
Le mystère de la chambre claire / photographie et inconscient. 1996